A la rencontre des membres de Babelio (35)

Avec plus de 910 000 utilisateurs, on en croise du monde sur Babelio. Pour que la communauté demeure, malgré son ampleur, un endroit convivial où l’échange est roi, nous avons décidé de vous donner la parole. En cette période propice à la lecture confinée et au grand rangement de sa bibliothèque, nous avons posé quelques questions à Aela, grande lectrice éclectique.

Rencontre avec Aela, inscrite depuis le 21 janvier 2011.

Comment êtes-vous arrivée sur Babelio ? Quel usage avez-vous du site ?

J’ai rejoint Babelio en 2011, et je profite de cet échange pour remercier mon amie Nathalie, qui m’a fait découvrir le site. J’utilisais auparavant un service dédié à la gestion de mes lectures sur Facebook, mais il a fermé, et j’ai pu tout récupérer avant de rejoindre Babelio. J’aime particulièrement la richesse des notices d’auteurs, les citations, et lire ce que les Babelionautes ont pensé de leurs lectures. Ça donne beaucoup d’idées de lectures.

Vous êtes très active sur Babelio et avez publié plus de 1 000 critiques sur le site. Qu’est-ce qui vous décide à faire ou non la critique d’une lecture ?

Je réserve mes critiques aux livres que j’ai aimés. Je n’aime pas descendre un livre. Quel que soit mon avis, j’ai toujours du respect pour le travail de l’auteur. Mais si j’aime, même juste un peu, je publie un commentaire !

Vous avez également publié de nombreuses listes sur des thèmes variés, des thrillers ésotériques aux documentaires jeunesse. Comment procédez-vous pour choisir les thèmes et constituer ces listes de recommandations ?

J’ajoute régulièrement des listes thématiques. Certaines en littérature jeunesse, car j’ai été enseignante. D’autres en littérature étrangère, ou sur le thème du couple, qui m’intéresse particulièrement. Et d’autres encore sur la Bretagne, où je réside depuis quelques années. Je me suis d’ailleurs mise à l’apprentissage du breton !

Quelle est votre première grande découverte littéraire?

Résurrection, de Tolstoï (disponible en Folio). Il est moins volumineux que d’autres romans de Tolstoï. C’est une excellente porte d’entrée dans son œuvre. Un destin de femme tragique : une jeune fille de la campagne, séduite puis rejetée, qui se retrouve accusée à tort de vol et déportée en Sibérie. Son séducteur se met alors en tête de la retrouver et de se racheter. C’est une lecture très intense, qui m’a émerveillée.

Résurrection
Illustration par Leonid Pasternak du chapitre 57 (Source Wikipedia)

Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Je suis très tentée de relire Sapiens, de Yuval Noah Harari (Albin Michel). J’ai été impressionnée par la capacité de synthèse phénoménale de cet historien israélien, capable de brosser ainsi 100 000 ans d’histoire de l’humanité. C’est un livre à mettre dans toutes les bibliothèques.

Dans un tout autre genre, j’aime me replonger régulièrement dans l’Ecclésiaste. C’est un livre de la Bible d’une grande profondeur, qui permet de surmonter les événements difficiles. Je l’ai lu pour la première fois après la perte de ma sœur, il m’a été d’un grand secours.

Vous êtes une lectrice éclectique, comme en témoigne votre présentation sur Babelio « J’aime la littérature russe, américaine, sud-américaine, les essais de philosophie, de relations internationales, les biographies…» Comment naviguez-vous entre les genres et les géographies ? Et quelles seraient vos recommandations pour les lecteurs de Babelio ?

J’ai étudié plusieurs langues étrangères : l’espagnol, le russe, l’allemand et l’anglais. Je lis en version originale en anglais et en espagnol. C’est peut-être cette pratique des langues qui me pousse vers la littérature étrangère. Elle me fait souvent plus vibrer qu’une littérature française parfois plus cérébrale. Mais je suis injuste, il y a bien entendu des auteurs français qui me font vibrer, tel Marc Dugain pour prendre un exemple.

En matière de littérature russe, je recommanderais Le journal de Léna, de Léna Moukhina chez Robert Laffont, qui m’a beaucoup touchée. C’est un récit de la vie pendant le siège de Leningrad, qui a démarré en 1941. J’ai eu l’occasion de visiter Saint-Petersbourg (anciennement Leningrad), où se trouve un musée du blocus très émouvant. Même en cette période de confinement, on a du mal à se figurer la violence de ce siège, qui a duré près de 900 jours et fait deux millions de morts. La vie quotidienne décrite dans Le journal de Léna en donne idée. Les assiégés en étaient réduits à manger la colle de leurs meubles pour ne pas mourir de faim.

J’ai aussi une affection particulière pour les lettres de Léon Tolstoï à sa femme, disponible aux éditions Rivages. De tempéraments opposés, ils formaient un couple explosif, mais très solide. Elle l’a soutenu toute sa vie, assurant l’intendance et mettant ses écrits au propre. Et l’on voit pourtant dans les lettres de Tolstoï à quel point elle pouvait l’excéder (on pense parfois à des couples que l’on connaît…) Mais il ne pouvait pas se passer d’elle.

Je suis également lectrice d’essais, notamment historiques, comme Sapiens. J’ai récemment découvert grâce à l’opération Masse Critique Les Deux clans, de David Goodhart, publié aux Arènes. Une réflexion passionnante sur la société anglaise, qui oppose les anywhere – une élite qui a embrassé la mondialisation – et les somewhere – qui sont au contraire enracinés, attachés à un territoire, à une culture locale. Délaissés, menacés économiquement, les somewhere représentent 75% de la population, et ne se retrouvent pas dans les décisions prises par les élites. C’est très éclairant, bien au-delà du cadre anglais, et peut permettre de mieux comprendre un mouvement comme les gilets jaunes.

Dans la même veine, je recommande L’Archipel français, de Jérôme Fourquet, au Seuil, dans lequel il explique que la France d’aujourd’hui est moins une nation homogène qu’une juxtaposition de communautés.

Une autre de mes passions, c’est l’astronomie. Même sans être scientifique, il existe des ouvrages remarquables sur ce sujet en constante évolution : la découverte des exoplanètes, par exemple, ne date que de 1995 ! Je recommande L’Univers à portée de main, de Christophe Galfard (Flammarion), un excellent travail de vulgarisation, qui peut même être conseillé à un adolescent. Les ouvrages de l’astronome Neil de Grasse Tyson sont également très accessibles, de même que certains livres de Stephen Hawking, ou ceux de Jean-Pierre Luminet.

J’ai eu la chance d’avoir comme professeur de philosophie Sylviane Agacinski, lorsque j’étais en classes préparatoires au lycée Carnot à Paris. Une enseignante d’une grande érudition, mais toujours d’un abord simple, accessible pour ses étudiants. J’aime ses travaux sur la place des femmes dans la société.

J’apprécie également André Comte-Sponville, un philosophe discret, mais brillant. Notamment Le Sexe ni la mort (Albin Michel), un très bel essai sur le couple.

En polar, il faut reconnaître que les nordiques sont très forts… Je considère Arnaldur Indridason comme un véritable héritier de Simenon. Un maître de l’atmosphère et de la psychologie des personnages. Son compatriote Ragnar Jónasson peut constituer une bonne entrée en matière dans le genre. Et je viens de lire L’Archipel des larmes, de Camilla Grebe (Calmann-Lévy), que je recommande : sur une période de quarante ans, elle décrit l’évolution de la place des femmes dans la police et la société suédoise.

J’apprécie également les polars de Peter May, un auteur écossais amoureux de la France, par exemple L’Île au rébus (Le Rouergue), qui se déroule sur la petite île de Groix, à quelques encâblures de chez moi. Et pour rester en Bretagne, je tire mon chapeau à l’auteur allemand Jean-Luc Bannalec (c’est un pseudonyme.) Ses polars situés dans la région sont incroyablement bien documentés, comme par exemple L’Inconnu de Port Bélon (Presses de la Cité), sur les dessous du marché de l’huître.

Pour conclure sur le polar, j’aime aussi les romans du Portugais José Rodrigues dos Santos, publiés chez HC Editions. Des romans policiers ésotériques pleins d’action, passionnants, qu’il évoque Christophe Colomb (Codex 632) ou la vie extraterrestre (Signe de vie).

En littérature anglaise, je viens de lire Le cœur de l’Angleterre de Jonathan Coe (Gallimard), qui montre à quel point la question du Brexit a pu déchirer les familles anglaises, au-delà des seuls enjeux politiques et économiques. Je recommande aussi les romans de Julian Barnes, comme La seule histoire, disponible en Folio, un portrait de femme courageux et inhabituel. Et dans un autre style, les romans historiques de Kate Mosse, sur Carcassonne ou les guerres de religions, toujours très bien documentés.

Impossible de parler de romans historiques sans citer Ken Follett. J’admire le travail colossal derrière ses sagas, comme Le Siècle, qui couvre l’histoire d’une famille depuis la Première Guerre Mondiale jusqu’à la guerre froide.

Dans les classiques, j’aime beaucoup Thomas Hardy, une sorte de Zola anglais. Tess d’Urberville (Le Livre de Poche), adapté au cinéma par Polanski, est un roman remarquable sur la disparition d’un monde, celui de l’Angleterre rurale à la fin du 19ème siècle.

De l’autre côté du Rhin, j’ai beaucoup aimé La Maison allemande, d’Annette Hess, sorti l’an dernier chez Actes Sud. Un très beau livre, centré sur une jeune femme chargée d’interpréter les dépositions de témoins polonais au second procès d’Auschwitz.

Chez les Américains, j’ai trouvé extraordinaire American Darling de Russell Banks (Actes Sud / Babel). Un roman très mouvementé sur une femme issue de la bourgeoisie engagée qui part travailler au Liberia et sur le couple qu’elle forme avec un politicien local.

J’aime aussi Joyce Carol Oates, notamment Les Chutes (Points) et Blonde (Le Livre de Poche) qui donne à voir une Marilyn Monroe méconnue.

Et je suis obligée de citer Patricia Highsmith, elle aussi du calibre de Simenon. La série des Ripley, c’est formidable. C’est elle qui m’a conduite au roman policier. Elle est un peu oubliée aujourd’hui, c’est un tort qu’il faudrait réparer.

Parmi les auteurs scandinaves, en période post-metoo, j’aimerais aussi recommander Un verre de lait, s’il vous plaît, de Herbjørg Wassmo, sorti il y a quelques années chez Gaïa. Ce roman jette une lumière crue sur l’exploitation des femmes en Scandinavie, à travers le personnage d’une jeune lituanienne attirée à Stockholm qui se retrouve séquestrée et prostituée. Une lecture très dure, dont on ne sort pas indemne.

Et sur un mode plus léger, j’ai apprécié Quatre jours en mars, du Danois Jens Christian Grondahl. Le récit d’une femme divorcée qui fait le bilan de sa vie en se demandant à quel point elle reproduit le parcours de sa mère.

Quelques romans français tout de même pour finir ce tour d’horizon ! Un hiver à Paris, de Jean-Philippe Blondel (Buchet-Chastel) restitue très bien l’ambiance des classes préparatoires aux grandes écoles. La femme gelée, d’Annie Ernaux, disponible en Folio, reste toujours d’actualité à propos de la pression qu’exerce la société sur les femmes. Et Voyage aux pays du coton, d’Erik Orsenna (Le Livre de Poche) est un formidable petit traité de la mondialisation.

Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

J’aime beaucoup cette citation de Jorge Luis Borges : « Uno llega a ser grande por lo que lee y no por lo que escribe », qu’on peut traduire ainsi : « Un homme est grand pour ce qu’il lit, non pour ce qu’il écrit. »

Et celle-ci, d’Albert Einstein : « Je crois en une vie après la mort, tout simplement parce que l’énergie ne peut pas mourir; elle circule, se transforme et ne s’arrête jamais. »

Quel est votre endroit préféré pour lire ?

Entre deux averses bretonnes, ma terrasse en bois. Avec un bon livre, c’est le bonheur !

Quelle sera votre prochaine lecture ?

White Palace, de Glenn Savan, disponible en poche chez Babel. Sorti dans les années 80, il raconte la rencontre entre deux êtres dissembables : un jeune publicitaire à qui tout réussit et une serveuse entre deux âges. Le livre a connu une adaptation au cinéma, avec notamment Susan Sarandon.

Merci à Aela pour ses réponses !

 

Avec Philippe Tessier, la Mort s’invite chez Babelio

Avec bientôt 170 rencontres au compteur, Babelio a accueilli tout type d’auteurs : des femmes, des hommes, des Français, des étrangers, des primo-romanciers et des vieux briscards de l’édition, des maîtres du polar, de la bande dessinée ou encore de la littérature jeunesse.

Mais le 24 avril dernier, c’est un invité tout particulier que trente lecteurs de Babelio ont eu le privilège de rencontrer : la Camarde en personne…

Ses yeux profonds sont faits de vide et de ténèbres,
Et son crâne, de fleurs artistement coiffé,
Oscille mollement sur ses frêles vertèbres.
Ô charme d’un néant follement attifé.

Dieu merci, sous la plume de Philippe Tessier, venu présenter son roman Morts, publié aux éditions Leha, la Mort est quand même plus sympathique et décalée que sous celle de Baudelaire. Comme en témoigne la couverture du livre, elle a d’ailleurs troqué sa faux contre un club de golf.

La Mort est au coeur de ce roman loufoque, qui voit le pauvre Joseph, à peine trépassé, se réveiller entouré de squelettes qui vont l’entraîner dans une étrange aventure, où il sera amené à croiser une farandole de macchabées aux noms étrangement familiers : Sigmund F., Charles de G., Winston C., Marie C., Abraham L., Karl M. ou encore Terry P….

Un crâne pour encrier

Pour Philippe Tessier, en vieillissant, la mort devient une obsession, qui nous travaille, sans nécessairement nous traumatiser pour autant. Il l’avait d’ailleurs souvent glissée dans ses romans. Cité par un lecteur présent à la rencontre, Mortimer, de Terry Pratchett, qui met en scène un adolescent devenu l’apprenti de la Mort, a effectivement été une influence revendiquée de Morts, mais pas le point de départ. Celui-ci se trouve dans un précédent roman de Philippe Tessier, publié chez Oskar Editions, dans lequel il imaginait une joyeuse bande de squelettes qui se levaient de leur tombe pour aller défendre la veuve et l’orphelin.

Quelques années après la sortie ce roman, en patientant derrière une table de dédicace au festival des Futuriales, sans être particulièrement harcelé par les visiteurs, il repensa au mot d’un ami : “tu as un don pour les squelettes.” Pour passer le temps, il s’est mis à griffonner une histoire 100% squelettes, qui allait devenir Morts. Ce n’est que dans un second temps qu’il s’est dit que pour que cette histoire fonctionne, il allait quand même avoir besoin d’un peu de chair, ce qui a conduit à la naissance de Joseph, le héros embaumé du livre.

Pourquoi des squelettes plutôt que des zombies ? Philippe Tessier a été biberonné aux zombies, notamment dans les films de George Romero et de Lucio Fulci, qu’il tient pour des sommets du genre et qui ont été pour lui des inspirations majeures, au même titre que Marie Shelley et Bram Stoker. Il voulait leur rendre hommage, mais trouvait inutile de refaire ce qui avait déjà été fait. Les squelettes autorisaient une approche plus comique, sans empêcher des clins d’oeil aux zombies pour autant, comme ces personnages de Walking Dead qu’il a glissé dans le livre.

Titre et couverture, un bien joli linceul pour le roman

Ne sachant pas comment intituler son roman, Philippe Tessier est allé au plus simple : Morts. À l’origine, le titre était Mort au singulier, puis le pluriel s’est imposé comme une évidence. D’autant plus que “Mort de Philippe Tessier” présentait le risque d’effrayer sa famille et ses amis s’ils tombaient dessus dans la presse ou sur le web…

La couverture, qui reprend une scène clé du livre, à savoir La Mort qui joue au golf, a séduit les lecteurs. Elle est le fruit d’une collaboration avec François Froideval, l’un des auteurs de la série de bande dessinées Les Chroniques de la Lune Noire et l’oeuvre du dessinateur Fabrice Angleraud. Plusieurs pistes avaient été envisagées, parmi lesquelles La Mort grimée en Oncle Sam pointant le doigt vers le lecteur avec la mention “I Want You”, ou encore les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse jouant au poker. Mais la scène du golf était finalement la plus visuelle et comique, indiquant clairement au lecteur de quoi il en retourne dans le roman. Quant à savoir pourquoi Philippe Tessier a décidé d’écrire cette scène, lui-même n’en sait rien, même s’il confesse que le fait que son fils ait participé à un stage de golf pendant la phase d’écriture a pu être une influence souterraine…

L’imaginaire, un plaisir de longue date

Romancier, traducteur, créateur de jeu de rôle, Philippe Tessier est tombé dans la potion de l’imaginaire à 5 ans, quand sa grand-mère lui a acheté un numéro de Strange, un magazine qui publiait en France les comics de Marvel. Sa mère, grande lectrice, l’a toujours poussé à lire, à commencer par la Bibliothèque Rose, dont certains titres font clairement partie de l’imaginaire. Après un passage scolaire par les classiques – Hugo et Baudelaire en tête – il s’est ensuite frotté aux classiques du genre (Dracula, Frankenstein, 1984, Le Meilleur des Mondes etc.) pour ne plus jamais l’abandonner. Et même s’il lit de tout aujourd’hui, il garde une préférence pour l’imaginaire, qu’il voit comme un prisme pour parler de notre société actuelle.

Ecrire pour le jeu de rôle demande d’imaginer et de décrire un grand nombre de personnages. Il faut imaginer un univers entier et ses évolutions potentielles. Aux yeux de Philippe Tessier, qui alterne romans et jeux de rôle, c’est un excellent exercice pour un romancier, même si dans le cas de Morts, dont l’univers est plus simple, il n’a pas eu à dessiner de grand tableau préalable comme ça peut lui arriver dans le cas d’un jeu ou d’une grande saga romanesque. De manière générale, il estime qu’il y a des passerelles entre tous les arts de l’imaginaire. Roman, jeu de rôle, photographie ou bande dessinée se nourrissent mutuellement.

Danse macabre

Les six premiers chapitres de Morts ont été écrits très rapidement. Ensuite, une fois obtenu le feu vert de son éditeur, le reste du livre a pris un an, à raison de trois à quatre heures d’écriture chaque matin. Une période intense, sur un livre qui a demandé plus de recherches qu’une oeuvre d’imaginaire pur, car Philippe Tessier souhaitait mettre des citations authentiques dans la bouche des figures historiques que croise le héros. Et s’il n’a pas eu de difficultés à se documenter sur de Gaulle, les choses étaient déjà moins simple pour Churchill, et plus compliquées encore pour Lincoln, pour qui il a souvent fallu extraire les citations du cœur de discours bien plus longs.

Philippe Tessier tenait à offrir un récit dynamique, dans lequel le lecteur ne serait jamais perdu en dépit de la multiplicité de personnages. La trame principale était très claire avant de démarrer la phase de rédaction, qui en définitive consistait plus à relier les points entre eux qu’à inventer au fil de la plume. Même s’il ne s’est pas interdit certains détours entre les étapes clés, en laissant parfois l’actualité s’immiscer dans le récit. Le passage sur la grève, par exemple, doit beaucoup à son énervement face aux blocages de la faculté de Nanterre qui ont empêché sa fille de passer ses examens… Sans être un commentaire du monde tel qu’il va, Morts a permis à Philippe Tessier de régler quelques comptes, plus aisément que ses précédents romans aux univers vraiment déconnectés du réel. Les journalistes, par exemple, sont pointés pour leurs tics de langage agaçants.

L’auteur a choisi de ne pas utiliser les noms complets des figures historiques qu’il met en scène, mais de simples initiales. Cela permettait de mettre une distance sur le sérieux de la chose : ce n’est pas tout à fait Charles de Gaulle ou Abraham Lincoln, ils restent des personnages. Et Morts reste un jeu, pas un traité philosophique ou historique. Un jeu qui était aussi l’occasion de rendre hommages aux œuvres et auteurs qui l’ont nourri : Jules Verne, H.G. Wells, Soleil Vert etc. Il tenait à couvrir toutes les époques, mais son panel de personnages de départ était trop large, et il a dû en mettre certains de côté à regret. Soumis à la question des lecteurs, il a fini par avouer que tous ces recalés pourraient bien fournir la matière d’une suite à Morts, sur laquelle il a néanmoins refusé d’en dire plus…

Et en parlant de suite, si vous vous demandez si Philippe Tessier croit à la vie après la mort, sa réponse est on ne peut plus pragmatique : “Je n’en sais rien, je verrai bien”…

Découvrez Morts de Philippe Tessier, publié aux éditions Leha.

Francesca Melandri libère le refoulé de l’Italie

2010, Rome. Ilaria, la quarantaine, trouve sur le seuil de sa porte un jeune Éthiopien qui dit être à la recherche de son grand-père, Attilio Profeti.

C’est sur cette scène que s’ouvre Tous, sauf moi, le dernier roman de Francesca Melandri, qui éclaire des pans mal connus de l’histoire de l’Italie. Et c’est à 30 lecteurs de Babelio que les éditions Gallimard ont ouvert leurs portes le 28 mars dernier, pour une rencontre privilégiée avec l’auteure.

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“Il était écrit que je deviendrais écrivain”

Comment naît un auteur ? Pendant près de 20 ans, Francesca Melandri s’est dédiée à son travail de scénariste, sans jamais sauter le pas du roman, au grand étonnement de ses proches. Car elle a toujours écrit. Petite déjà, elle rédigeait des poèmes satiriques sur ses sœurs aînées. Mais alors qu’elle a débuté comme scénariste dès l’âge de 20 ans, elle avait cette conviction intime qu’elle ne pourrait pas écrire son premier roman avant d’avoir fêté ses 40, sans bien pouvoir expliquer pourquoi. Sans doute cela avait-il à voir avec le respect que lui a toujours inspiré la littérature, quelque chose de l’ordre du sacré. Pour devenir romancier, il fallait avoir vécu, pas simplement savoir écrire.

Un projet littéraire au long cours

Même s’il peut se lire indépendamment des deux précédents romans de Francesca Melandri, Tous, sauf moi a été conçu dès le départ – soit près de dix ans avant sa parution en France – comme le dernier pan d’une trilogie initiée en 2010 avec Eva dort et poursuivie en 2012 avec Plus haut que la mer.

En travaillant sur Eva dort, un premier roman historique, Francesca Melandri a rapidement réalisé qu’un seul livre ne suffirait pas pour ce qu’elle avait à dire, et elle a conçu cette « trilogie des pères », trois romans sans liens narratifs mais avec une forte cohérence thématique, trois briques d’un même projet littéraire : comment raconter le XXe siècle italien et européen ? Comment montrer les jeux de miroirs entre les structures des rapports privés, familiaux et les macrostructures historiques et nationales, qui obéissent souvent aux mêmes lois ? Ce qu’elle a souhaité explorer dans ces trois livres, ce sont les correspondances entre la vie psychique d’un individu et celle d’une nation, à commencer par la quête de l’identité. Et Tous, sauf moi s’inscrit dans cette ligne, en mêlant inextricablement passé colonial et présent migratoire de l’Italie.

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“Mon désir, c’est d’emmener le lecteur à mes côtés dans ce grand voyage qui m’a pris dix ans.”

À une lectrice l’interrogeant sur la construction complexe du récit, qui multiplie les allers-retours temporels et géographiques, l’auteure explique qu’avant de s’atteler à la rédaction proprement dite, elle a passé un an à peaufiner la structure du livre, à en tester la fluidité, pour s’assurer que le lecteur ne serait jamais perdu.

Et ce lent polissage de la charpente n’a été qu’une étape de la préparation. Que ce soit sur l’île qui sert de décor à Plus haut que la mer, ou en Ethiopie pour Tous, sauf moi, les dix ans d’écriture ont aussi été pour l’auteure dix années de recherches sur le terrain. Elle ne conçoit pas l’une sans les autres. Elle a d’ailleurs continué à se documenter et à échanger avec des témoins jusqu’au dernier mois de la rédaction de Tous, sauf moi.

Pour préparer son roman, Francesca Melandri s’est rendue deux fois en Éthiopie. Au cours d’un premier séjour d’un mois, fin 2008, elle a pu recueillir les souvenirs de personnes âgées qui avaient connu l’occupation italienne. A son retour en 2014, la plupart de ces derniers témoins s’étaient éteints.

Elle a également échangé avec des Italiens : un journaliste, grand résistant et ami de son père, qui l’a aidée à cerner la nature du fascisme éternel, qui est en définitive moins une idéologie qu’une mentalité, une façon d’être au monde. Et un ancien soldat qui a partagé avec elle le récit émouvant d’un jeune appelé qui se retrouve plongé sans préparation dans les horreurs de la guerre.

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Pour l’histoire de l’Éthiopien, qui frappe à la porte de l’héroïne au début du roman, elle s’est entretenue avec plusieurs réfugiés, mais elle a préféré ne pas visiter de camps par respect pour ceux qui les peuplent. Comment prétendre comprendre leur détresse, leur rapport à l’attente, en passant une heure dans un camp encadrée par deux accompagnateurs ?

L’auteure prend le soin de remercier ces témoins à la fin du livre. Une lectrice confesse avoir été émue aux larmes par la dernière phrase de ces remerciements, citation d’un témoin éthiopien : “Quand j’étais jeune, je me suis battu contre ton peuple et aujourd’hui tu viens chez moi pour m’écouter. Quel heureux jour ! Dimanche prochain, après la messe, je le raconterai à tout le monde.

À juste titre

Interrogée sur le choix du titre de l’édition française – Tous, sauf moi ayant été préféré à Sang juste (traduction littérale du titre original Sangue giusto) – Francesca Melandri explique qu’au-delà de la sonorité bancale de “sang juste” en français, le sens italien de “giusto” ne passait pas dans les différentes traductions étrangères. Notamment en Allemagne, où la référence au sang juste pouvait être prise pour une réminiscence du nazisme très éloignée du propos du livre. L’éditeur allemand a proposé “Tous, sauf moi”, mantra de l’irresponsabilité, qui peut caractériser aussi bien le grand-père du personnage principal qu’une facette de la société italienne. Il a été conservé dans les autres traductions.   

Prophète en son pays

Tous, sauf moi n’a pas encore été publié en Éthiopie, mais la traduction anglaise qui arrivera prochainement devrait permettre de toucher un lectorat local. Quant à lire la version originale, s’il existe encore des lycées italiens de très bon niveau dans le pays, ils sont réservés à une élite italophone peu nombreuse. De moins en moins nombreuse d’ailleurs, l’anglais et le chinois remplaçant progressivement l’apprentissage de l’italien.

Concernant l’accueil réservé à Tous, sauf moi par les lecteurs italiens, il a été initialement plutôt timide, en dépit de critiques élogieuses et d’une place dans la liste des finalistes du prestigieux prix Strega. Les ventes ne décollaient pas. Il a fallu que le livre explose en Allemagne, se retrouve dans la liste des meilleures ventes de Der Spiegel, pour que la presse italienne se penche sur ce phénomène éditorial à l’étranger et que Francesca Melandri soit enfin prophète en son pays. Elle soupçonne aussi que le sujet du livre, une radiographie de l’Italie contemporaine et de ses zones d’ombre, ait pu expliquer en partie ce manque d’intérêt initial…

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Devenir les parents de ses enfants

Francesca Melandri souligne que chez les historiens, le passé colonial de l’Italie ne fait plus débat. Les faits sont connus. Mais ce consensus historiographique n’est pas encore descendu dans la conscience des Italiens eux-mêmes. D’où l’importance de la transmission par les arts, par la fiction. Tous, sauf moi, parmi d’autres œuvres parues ces dernières années, s’inscrit dans ce travail. Il est d’ailleurs significatif que ces œuvres émanent souvent de femmes, d’origine éthiopienne ou somalienne pour certaines : la problématique du genre a bien des résonances avec celle du racisme.

Évoquée dans le roman, la bataille récente menée conjointement par les associations de partisans italiens et éthiopiens  pour faire déboulonner une statue du Maréchal Graziani, qui dirigeait l’occupation en Éthiopie, témoigne que le combat mémoriel n’est pas encore gagné. Même si l’auteure se réjouit que le juge ait tranché en faveur du déboulonnage quelques jours avant la rencontre avec ses lecteurs.  

L’exploration du passé est au cœur de Tous, sauf moi, mais Francesca Melandri invite aussi à regarder vers l’avenir. Si elle confesse que de tous ses personnages, Ilaria, l’héroïne du roman, est sans doute la plus proche d’elle, ce n’est pas un autoportrait pour autant. Notamment parce qu’Ilaria n’a pas d’enfant, ce qui explique en partie son intérêt pour le passé. La maternité est un point de bascule, à partir duquel le regard se tourne vers ceux qui suivent : “On cesse d’être les enfants de ses parents pour devenir les parents de ses enfants.

Avec la publication de Tous, sauf moi s’achève un cycle d’écriture de dix ans. Même si en réalité, le temps de la traduction et de l’édition fait que deux ans se sont déjà écoulés depuis que Francesca Melandri a mis un point final à sa trilogie. Et l’envie d’écrire la démange à nouveau. Elle confie à ses lecteurs le lancement d’un nouveau projet littéraire très ambitieux, mais sur lequel elle ne dira rien de plus, si ce n’est qu’il ne s’agira pas d’un roman historique. Espérons simplement ne pas avoir à patienter dix ans pour la retrouver…

Découvrez Tous, sauf moi de Francesca Melandri, publié aux éditions Gallimard.

Dans les eaux troubles du Golfe de Finlande avec Denis Lépée

C’est le 21 mars dernier que 30 lecteurs de Babelio ont été reçus aux Éditions de l’Observatoire, non pour fêter un printemps désespérément absent, mais pour échanger avec Denis Lépée autour des Engloutis, son nouveau livre à la frontière entre roman noir et roman d’aventures, qui arrivait le jour même en librairie. Et les derniers frimas offraient finalement un cadre plutôt adapté pour parler de cette plongée dans les eaux sombres du Golfe de Finlande…

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Dix ans après

Les Engloutis marque le retour de l’archéologue Tommaso Mac Donnell, spécialisé en plongée sous-marine, dont les lecteurs avaient pu faire la connaissance il y a plus de dix ans dans L’ordre du monde. Si pendant la décennie qui a séparé les deux livres, Denis Lépée s’est plutôt adonné à son autre veine littéraire, celle du roman historique, il n’a de son propre aveu jamais cessé de converser avec son personnage. Et il était curieux de voir comment Tommaso avait pu évoluer en dix ans. Il l’a retrouvé avec plaisir, l’archéologue ayant toujours compté parmi ses personnages préférés.

Un écrivain à sa table

Interrogé sur ses méthodes d’écriture, Denis Lépée, explique avoir toujours avant de prendre la plume un point de départ – en l’occurrence, une plongée sur une épave réelle, coulée par un sous-marin allemand dans des conditions proches de celles du roman – et un point d’arrivée, mais pas nécessairement les étapes qui mèneront de l’un à l’autre. Les connexions se font ensuite, au fil de l’écriture. Sachant qu’il n’écrit pas de manière linéaire. Il peut tout à fait rédiger un chapitre situé vers la fin de l’histoire, puis un passage antérieur. Et il écrit toujours beaucoup plus que la matière que l’on trouve dans le livre édité. Une part de son travail s’apparente à celui d’un sculpteur : il passe et repasse sur le texte pour le polir, élaguer ce qui pourrait alourdir ou ralentir l’intrigue.

Quant à savoir quand achever son livre, c’est un travail délicat, une forme de décélération qui doit conduire à une fin ni trop abrupte, ni trop languide. Il n’est pas toujours facile de s’arrêter au bon endroit, et cela se fait souvent par tâtonnements.

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Bienvenue en Finlande

« Les zones de débat, de marge, sont toujours des endroits riches. »

Pour beaucoup de lecteurs, Les Engloutis a notamment été un appel à découvrir la Finlande. Aux yeux de Denis Lépée, cette terre si particulière n’est pas qu’un simple cadre, mais bien un personnage du roman à part entière. C’est une ligne de fracture historique entre les blocs Est et Ouest, dont les eaux sombres cachent nombre d’épaves et plus encore de mines sous-marines. C’est un pays à l’envers, où la mer l’emporte sur la terre. Une mosaïque d’îles à la topographie changeante. Lorsqu’on pose le pied quelque part en Finlande, on ne sait jamais si ça va être sur de la terre ou de l’eau. Pour un visiteur étranger, cette géographie unique est troublante, comme peut l’être la psychologie des Finlandais, un peuple qu’on connaît peu, moins que ses voisins suédois ou russes.

Le long des golfes sombres

«Les épaves sont fascinantes. Ce sont des témoignages de la défaite du monde des hommes face au monde marin. »

Auvergnat d’origine, Denis Lépée n’en a pas moins développé une passion pour la mer. Passion littéraire, Hermann Melville figurant très haut dans son panthéon personnel, même si d’autres écrivains plus terriens y ont aussi leur place, comme Alexandre Dumas, Charles Dickens ou Ernest Hemingway. Mais également passion de plongeur : sans être un découvreur d’épaves, il prend un grand plaisir à visiter celles déjà répertoriées, et dès que ses obligations parisiennes lui en laissent le loisir, ne manque pas une occasion de rallier la Bretagne nord pour en explorer les eaux glacées.

« Celui qui n’est plus un ami n’a jamais été un ami », Aristote

Cette phrase, Denis Lépée l’avait placée en exergue d’un de ses précédents romans. Mais l’amitié, est un thème qui traverse aussi Les Engloutis, une question qui lui tient particulièrement à cœur. L’amitié est un sentiment qui peut prendre des couleurs variées, être vécu avec légèreté, ou au contraire de manière absolue tel un code d’honneur, comme c’est le cas pour Tommaso.

Tommaso qui semble avoir gagné de nombreux nouveaux amis à l’issue de cette lecture et de cet échange, puisque les lecteurs ont pressé Denis Lépée de questions pour savoir s’ils allaient le retrouver dans un prochain roman. Réponse de l’auteur : « La question n’est pas tant de savoir si, car l’envie est bien là, mais quand, car il n’est pas toujours facile de savoir quel ordre donner à ses différents projets d’écriture. »

En attendant, pour ceux qui ne l’ont pas encore fait, il est déjà possible d’explorer la Finlande et ses mystères en compagnie de Tommaso Mac Donnell dans Les Engloutis, de Denis Lépée, aux Éditions de l’Observatoire.

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Quand les lecteurs de Babelio rencontrent Christina Lamb

Tout juste revenue d’Alep, en Syrie, la journaliste britannique Christina Lamb a passé quelques heures en compagnie d’une trentaine de lecteurs de Babelio le 7 novembre dernier, pour échanger autour de Nujeen, l’incroyable périple, témoignage qu’elle a écrit à quatre mains avec la jeune Syrienne Nujeen Mustafa, et publié en France chez Harper Collins.

À 16 ans, elle a fui la Syrie ravagée par la guerre en fauteuil roulant. 

Le témoignage exceptionnel et poignant d’une jeune fille qui a choisi la voie de l’espoir.

En 2015, Fergal Keane, journaliste à la BBC, repère dans la foule des migrants une adolescente en fauteuil roulant. Emu et admiratif devant tant de cran, il recueille son témoignage. Aussitôt, les medias et les réseaux sociaux s’enflamment.

Avec la collaboration de Christina Lamb, Nujeen raconte comment elle a trouvé le courage de s’engager dans ce dangereux périple de 6 000 kilomètres, depuis la Syrie jusqu’à l’Allemagne en passant par la Grèce et la Hongrie.

Un récit porté par l’incroyable détermination de Nujeen et le principe auquel elle n’a pas dérogé : ne jamais être une victime.

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Diplômée d’Harvard, d’Oxford, grand reporter pour le Sunday Times, couronnée par de nombreux prix, dont le prix Bayeux-Calvados qui récompense le meilleur correspondant de guerre européen, la biographie de Christina Lamb a de quoi intimider les lecteurs. Elle est notamment le coauteur de Moi, Malala, qui a fait connaître au monde le combat de Malala Yousafzai pour l’éducation au Pakistan, combat qui a valu à la jeune Pakistanaise le Prix Nobel de la Paix en 2014.

Le destin d’une jeune fille

Après Malala, Christina Lamb a voulu se faire le porte-voix de Nujeen, une Syrienne de 16 ans, handicapée, qui a réussi à fuir son pays en guerre en 2014. Par ce témoignage, Nujeen et Christina Lamb ont souhaité faire passer un message : les migrants ne sont ni une maladie, ni une statistique. Ce sont des gens comme vous et moi.

Christina Lamb a choisi de consacrer un livre à Nujeen, plutôt qu’un simple portrait dans un journal. Cela lui permettait de rendre son histoire dans le détail, dans un souffle plus long, a fortiori sur un sujet complexe comme la situation en Syrie.

Depuis 28 ans qu’elle couvre des conflits, Christina Lamb aime écrire à hauteur d’homme, en relayant le point de vue d’acteurs impliqués, que ce soit dans ses articles ou dans ses livres. Cela facilite l’identification pour le lecteur, surtout lorsque l’on parle de territoires et de situations éloignés de son quotidien.

Ce livre, c’est l’histoire de Nujeen, son vécu. Née en 1999, elle a connu la dictature, la révolution, et la guerre. Son destin est intimement lié à l’histoire de son pays.

A l’origine, Nujeen n’était pas sûre que son histoire intéresserait qui que ce soit. Mais pour quelqu’un qui a grandi avec le sentiment d’être un fardeau, d’être inutile pour sa famille, écrire un livre c’était avoir enfin quelque chose à dire.

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La fabrique d’un témoignage à quatre mains

La rédaction du livre s’est faite sous la forme d’une série d’interviews. Une fois que Nujeen s’est installée en Allemagne, la communication s’en est vue simplifiée, notamment grâce à Skype. Christina Lamb a également mené des entretiens avec ses frères et sœurs réfugiés avec elle en Allemagne, ainsi qu’avec ses parents et son autre frère établis dans le sud de la Turquie.

Nujeen étant cantonnée dans son appartement, la guerre venait à elle à travers les yeux de son frère et sa sœur, qui sortaient pour étudier. C’est pourquoi leurs témoignages à eux aussi étaient essentiels pour le livre. C’est à travers eux que Nujeen a pris conscience de l’histoire et de l’actualité de son pays.

En tant que correspondante de guerre, Christina Lamb a été confrontée à l’horreur toute sa carrière. L’indéfectible optimisme de Nujeen a été pour elle particulièrement rafraîchissant. Son optimisme, mais également sa curiosité sans limite. Nujeen a toujours été avide d’apprendre. Elle a même fini par en remontrer à Christian Lamb sur des faits obscurs de l’histoire de l’Angleterre…

De par son métier, l’auteur connaissait bien le sujet, les zones traversées par Nujeen. Elle avait à cœur de montrer dans ce livre la logistique, toute l’organisation que demande un projet d’émigration. Comment on trouve un passeur, comment on se débrouille pour charger son téléphone etc. Le seul endroit du périple de Nujeen où elle n’était jamais allée, c’était le point de départ, la ville d’Alep, et elle a justement fini par pouvoir s’y rendre la veille de la rencontre.

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A propos de la Syrie et des migrants

Interrogée sur la guerre en Syrie, Christina Lamb rappelle que le printemps arabe est né en Tunisie, puis s’est étendu à l’Egypte et à d’autres pays de la région avant d’arriver en Syrie en mars 2011. Mais le régime de Bachar al Assad a étouffé le mouvement dans l’œuf, en lui opposant immédiatement une réponse militaire.

« De toute ma carrière, je n’ai jamais vu une ville aussi détruite qu’Alep. Bachar al Assad est très confiant : il estime que pour le citoyen syrien, le seul choix possible est entre son régime et l’Etat Islamique, et que pris dans cet étau, le citoyen choisira el Assad plutôt que Daesh

À ses yeux, le terrorisme actuel prend racine dans le soutien apporté aux djihadistes afghans par les occidentaux dans les années 80 (la CIA, le MI6, le renseignement français.) En ces temps de guerre froide, toute opposition à l’URSS était bonne à prendre. Le retrait des troupes soviétiques en 1989 a laissé 45 000 combattants armés livrés à eux-mêmes, sous le commandement d’Oussama Ben Laden. C’est parmi eux qu’on trouvera les promoteurs d’Al-Qaïda hier, et de l’Etat Islamique aujourd’hui.

Si Nujeen est aujourd’hui en Allemagne, c’est qu’elle a suivi le même parcours que beaucoup de migrants après l’engagement d’Angela Merkel d’ouvrir les portes du pays à un million de réfugiés. La plupart de ceux qui fuient la Syrie souhaitent se rendre en Allemagne ou dans les pays scandinaves, où ils espèrent être accueillis et aidés. La France et la Grande-Bretagne ont en revanche mauvaise réputation : « Je n’ai jamais rencontré un seul migrant qui rêvait d’aller en France. »

« En tant qu’Européenne couvrant la crise des migrants, j’ai éprouvé un sentiment de honte. Sur un continent qui compte 500 millions d’habitants, il ne devrait pas être si compliqué d’accueillir un ou deux millions de réfugiés. L’Europe aurait pu mettre en place des infrastructures pour les accueillir dignement, ne pas les laisser dormir dans des champs boueux ou se faire tabasser par la police. C’est honteux. » Elle rappelle que le flux de migrants s’est tari car l’Europe a fermé ses portes. Ils se retrouvent aujourd’hui bloqués en Italie et en Grèce, qui n’ont pas les moyens de les accueillir. Et la voie terrestre étant fermée, beaucoup choisissent de passer par la mer, s’exposant aux tragédies que l’on connaît.

La télévision, fenêtre sur le monde

Condamnée par son handicap a rester enfermée au 5ième étage toute sa jeunesse (sans ascenseur, elle ne pouvait sortir que dans les bras de son frère), Nujeen a appris l’anglais grâce aux feuilletons américains qu’elle regardait en boucle à la télévision, en particulier Des Jours et des Vies (diffusé en France sur France 2) Elle dit d’ailleurs parler « un anglais de soap opera ».

Christina Lamb souligne le rôle clé de la télévision dans le développement de Nujeen. C’est paradoxal pour une mère occidentale qui n’a aucune envie de voir son fils planté devant le petit écran du matin au soir. Et pourtant, pour Nujeen, la télévision était la seule fenêtre sur le monde, dispensant à la fois divertissement et éducation. Elle a initié la jeune fille l’anglais grâce à Des jours et des vies, « cet horrible feuilleton », mais aussi à l’histoire, à la science, à l’actualité etc. Tout une vision du monde informée par la télévision : «En arrivant en Europe, Nujeen a été très déçue de voir que la nourriture était bien différente de celle qu’on voyait dans Master Chef… »

Lorsqu’un journaliste l’ayant rencontrée à la frontière serbe lui a demandé pourquoi elle parlait un si bon anglais, c’est tout naturellement que Nujeen a répondu que les acteurs de Des jours et des vies avaient été ses professeurs. La presse s’est évidemment emparée de l’anecdote. Si bien que les acteurs de la série ont fini par tourner une séquence dédiée à Nujeen, diffusée dans le talk-show de John Oliver. Au départ, elle était très excitée de voir ces acteurs qui l’avaient tant obsédée parler d’elle. Mais finalement, elle a été un peu déçue : d’une part de voir son intimité ainsi dévoilée à l’écran, et d’autre part parce qu’elle jugeait totalement irréaliste de voir les personnages de Des Jours et des vies parler de la question des réfugiés…

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Un mot de la traductrice

Exceptionnellement, l’interprétariat de la rencontre était assurée par la traductrice du livre, Fabienne Gondrand, qui a accepté de dire quelques mots de son travail sur ce livre : « Traduire un témoignage, c’est avoir la responsabilité de porter une voix unique, sincère, touchante. On n’a pas le droit de la trahir. Il faut tâcher d’être le plus juste possible, surtout lorsqu’il s’agit comme Nujeen d’une jeune fille pleine d’espoir et d’humour. Pour tout vous dire, il m’est arrivé à plusieurs reprises de pleurer d’émotion devant mon écran. »

Un livre, et après ?

À une lectrice l’interrogeant sur la vie de Nujeen en Allemagne, Christina Lamb répond que même s’il y a évidemment « beaucoup de choses à réparer », elle a pu aller à l’école pour la première fois, se faire des amis, avoir un fauteuil adapté. Lorsqu’elle l’a vue deux semaines plus tôt, la jeune fille était ravie car elle venait de se faire poser des bagues dentaires ! Elle est donc plus heureuse qu’à Alep, même si son pays lui manque, tout comme ses parents, qui sont toujours en Turquie.

Concernant ses relations actuelles avec Nujeen et Malala, les deux jeunes femmes dont elle a porté le témoignage, Christina Lamb estime qu’il serait horrible d’écrire sur la vie de quelqu’un et de couper les liens une fois le livre sorti. Elle reste très proche des deux. Elle a tout récemment visité le zoo de Cologne avec Nujeen, toujours aussi curieuse de tout, qui n’a pas manqué de lui raconter mille anecdotes sur la vie des animaux. Et elle rapporte cette anecdote à propos de Malala, devenue une amie de sa famille : « Lorsqu’elle a reçu le prix de Nobel de la Paix, mon fils m’a dit : ‘Mais Maman, ils ne peuvent pas lui donner : elle est toujours en train de se battre avec son frère !’ »

De manière générale, Christina Lamb explique que les communications ont bien changé depuis ses premières années de journaliste. Il était autrefois plus difficile de rester en contact avec quelqu’un rencontré à l’occasion d’un reportage à l’autre bout du monde. Aujourd’hui, tous les migrants sont sur WhatsApp : « Je reste en contact avec tous ceux que je rencontre. Et ils passent même mes coordonnées à d’autres migrants. Je reçois régulièrement des messages d’inconnus qui me disent ‘Je suis coincé en Croatie ! Que faire ?’. Je suis devenue un vrai service de renseignements ! »

Sur ce sourire s’achève une rencontre qui a traité de sujets d’actualité parfois difficiles, mais transcendés par l’optimisme de cette jeune syrienne de 16 ans. Les lecteurs ont pu poursuivre leurs échanges avec Christina Lamb à l’occasion d’une séance de dédicace.

Retrouvez Nujeen, l’incroyable périple de Nujeen Mustafa et Christina Lamb, publié chez Harper Collins.

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Retrouvez notre interview en vidéo avec l’auteur ainsi qu’un aperçu de la rencontre :

Quand les lecteurs de Babelio rencontrent Megan Kruse

C’est dans les locaux de Babelio que trente lecteurs ont retrouvé Megan Kruse le 8 septembre dernier, pour une rencontre autour de son premier roman, De beaux jours à venir, publié aux éditions Denoël. Une rencontre animée par Pierre Krause, et dont Fabienne Gondrand a assuré l’interprétariat.

Depuis des années, Amy subit la violence de Gary. Jusqu’au jour où elle reçoit le coup de trop et décide de s’enfuir avec ses deux enfants, Jackson, dix-huit ans, et Lydia, treize ans. Premier arrêt au Starlight, motel crasseux qui va leur servir de refuge. Tous les trois s’endorment sereins et soulagés, mais au petit matin Jackson a disparu. Croyant gagner l’amour d’un père qui le rejette, il est retourné chez eux et a trahi sa mère et sa sœur en révélant à Gary l’adresse du motel. Amy se rend alors à l’évidence : si elle veut assurer sa sécurité et celle de Lydia, elle va devoir abandonner son fils. Cette séparation brise le cœur de la petite fille, très attachée à ce frère doux et différent. Jackson, de son côté, doit désormais se débrouiller seul, tiraillé entre la recherche désespérée de l’amour paternel, sa culpabilité et sa difficulté à gérer son homosexualité naissante. De beaux jours à venir est un roman terriblement juste, touchant et sans complaisance, sur la famille, les sacrifices que l’on peut faire en son nom, et leurs conséquences. Un chef-d’œuvre où l’émotion prend à la gorge à chaque page.

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Un premier roman très personnel

Megan Kruse a commencé par saluer la couverture choisie par son éditeur français, qu’elle juge plus réussie que celle de l’édition originale américaine. Elle apporte une précision : De beaux jours à venir est son premier roman publié, mais elle en avait écrit deux auparavant, qui selon elle ne menaient à rien, et qu’elle a préféré mettre à la poubelle. Dans celui-ci, elle a mis toute son identité, et avant d’être publiée, elle se disait que si elle ne trouvait pas d’éditeur, elle n’en écrirait pas d’autre, car elle ne voyait pas comment elle pourrait faire mieux.

Si elles n’étaient pas publiables, ses deux premières tentatives s’attaquaient toutefois aux mêmes thèmes que De beaux jours à venir, qui lui tiennent particulièrement à cœur : Qu’est-ce qu’un foyer ? Dans quelles conditions peut-on dire qu’on est « chez soi » ? Et comment trouve-t-on cet endroit lorsque l’on est homosexuel dans un milieu rural conservateur et qu’on sait qu’on va devoir partir ?

Le livre est né sous la forme d’une nouvelle, autour du personnage de Jackson, vivant dans un campement à proximité d’un chantier. Au fil de l’écriture, le personnage a pris de l’importance, et le texte s’est développé naturellement autour de lui, pour devenir progressivement  un roman. Elle a suivi la voix de Jackson, pétrie de culpabilité, et la nécessité d’autres voix autour de la sienne a donné naissance aux autres personnages, qui sont apparus dans les failles, les lacunes de Jackson. Megan Kruse est entrée en résonance avec les voix du roman qui renvoient à différentes parties de son identité, sous des modalités distinctes : la voix de Lydia vient du plus profond d’elle-même, tandis que celle de Jackson est plus celle de la chronologie de l’histoire.

Interrogée sur la part de fiction et d’expérience vécue dans le roman, l’auteur répond par un pied de nez : « Tout est vrai dans le livre, sauf ce qui ne l’est pas… » Son processus d’écriture consiste à s’appuyer sur le matériau brut qu’est sa propre vie, sur ses observations. Jackson et Lydia sont nés de son expérience, mais ne sont pas calqués sur des personnes réelles. Amy, en revanche, a été influencée plus directement par une femme rencontrée dans un centre d’aide aux violences domestiques.

La construction alternée de ce récit à deux voix s’est faite dans un second temps. Elle a commencé par les passages narrés par Jackson. Elle a écrit différents pans de l’histoire, comme des vignettes, et les a réarrangés a posteriori pour bâtir une chronologie. Elle voyait ces vignettes comme des fenêtres sur la vie des personnages, en espérant que de leur juxtaposition naîtrait un roman.

Lorsqu’un lecteur lui demande pourquoi le personnage du père abusif est le seul dont le point de vue est absent du livre, Megan Kruse répond que donner une voix à un personnage, c’est forcément inviter à l’empathie. Et que ce type là ne le mérite pas. Elle ne souhaitait pas qu’on le comprenne. Pas d’empathie pour les responsables de violences domestiques.

La question centrale du roman est celle de la famille. Qu’est-ce qu’une famille ? Megan Kruse a grandi dans une famille qu’elle détestait, elle se sentait étrangère à son environnement, avec une irrépressible envie d’en partir. Elle avait alors la conviction qu’à un moment donné, la vie lui montrerait d’elle-même le chemin, l’endroit où elle se sentirait enfin chez elle. En vieillissant, elle a réalisé que le sentiment d’avoir un foyer n’était pas nécessairement quelque chose de fixe, un lieu entre quatre murs. Mais qu’il dépendait bien plus des gens dont on s’entoure.

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Une nature omniprésente

Un lecteur souligne que les scènes clés du roman se tiennent toutes au bord d’une rivière. Ce n’est pas un choix conscient de l’auteur. Le roman prend place dans le Nord-Ouest des Etats-Unis, et Megan Kruse rappelle qu’ « il y a de l’eau partout, là-bas ». Elle se souvient qu’enfant, ses chaussures étaient couvertes d’une perpétuelle pellicule de moisi, tant ces terres sont humides. Mais cette omniprésence des rivières est une illustration du poids de la nature dans cette région : dans le Pacifique Ouest, il n’y a pas de séparation nette entre l’homme et son environnement, on est peu protégé des éléments. C’est un territoire brut et sauvage. Et c’est un champ ouvert, peu défini. Il y des écrivains locaux, comme Raymond Carver ou David Guterson, mais pas de mythologie littéraire comme il peut y en avoir autour de l’Ouest, par exemple. Ce livre est pour Megan Kruse une tentative égoïste de représenter un lieu qu’elle connaît. Un lieu où la nature fait partie du quotidien, où il n’y a pas de frontière nette entre chez soi et l’extérieur. Mais en dépit du ton sombre du roman, elle ne voit pas du tout cette région comme une zone déprimante ou sinistrée. C’est une région magnifique, avec des villes très progressistes et ouvertes d’esprit. Elle souligne qu’il y a aussi beaucoup d’amour dans son roman. Et que de toute façon, quand on traite de la pauvreté, que vous soyez en Oregon ou sous le soleil du Brésil, la réalité est forcément grise.

Poursuivant sur la nature, Megan Kruse explique que la forêt est dans le roman un refuge pour Jackson et Lydia. La nature interagit avec les deux enfants. Ils s’informent l’un l’autre. Et la forêt, qui les préserve de la violence domestique, est finalement plus bienveillante que le monde des hommes.

Le roman se tient dans sa région. Le foyer de Jackson et Lydia, par exemple, a beaucoup de points communs avec celui dans lequel elle a grandi. Mais ce n’est pas un reportage ou un témoignage pour autant : certains lieux ont été totalement inventés. C’est là tout le plaisir de la fiction, qui permet de bâtir des mondes. Elle avait le sentiment d’être autoriseé à décrire certains lieux qu’elle connaît très bien, comme la ville de Missoula, mais a préféré en inventer d’autres pour remplacer ceux qu’elle connaît moins bien.

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Des thèmes difficiles, mais un regard optimiste

Un lecteur se demande pourquoi Amy, la mère, reste silencieuse face aux violences conjugales dont elle est victime. Megan Kruse explique que dans ce genre de situation, bien souvent, les victimes sont seules, et se refusent à demander de l’aide. Et que paradoxalement, elles sont souvent plus seules encore lorsqu’il y a une famille autour, car elles essayent de la préserver. Pour protéger ses enfants, Amy fait le choix de l’invisibilité. Elle endosse ce fardeau injuste. Elle est la version extrême d’une situation extrême.

Le personnage de Jackson, lui, ne sait que faire de sa colère, contre son père, mais aussi contre sa mère. Lorsqu’on est adolescent, on fait des choses sans savoir pourquoi, c’est comme ça que l’on devient adulte. Sa réaction, lorsqu’il trahit sa mère dans le roman, est typique d’un adolescent dans cette situation. C’est quelque chose que Megan Kruse décrirait comme une « faiblesse chaotique d’adolescent ». Amy, le laissant faire, lui offre la possibilité de se libérer, d’être indépendant, de cesser de la protéger pour vivre enfin son identité et sa sexualité.

Interrogée sur l’optimisme du titre français, « De beaux jours à venir », Megan Kruse répond que le titre original « Call me home » était difficilement transposable en français. Mais elle aime cet optimisme, qui correspond bien à sa conviction : on finit tous par trouver un endroit qu’on peut appeler « chez soi ». C’est cet optimisme qu’on retrouve dans la dernière scène du livre, avec les retrouvailles des personnages. A l’origine, elle n’avait pas mis cette scène. Le roman s’achevait avec un saut en 2026, où l’on découvrait que chaque personnage avait trouvé son bonheur. Mais son éditrice lui a dit que ce n’était tout simplement pas possible de finir ainsi. D’où les retrouvailles. Et en définitive, elle aime que son roman s’achève ainsi. Les personnages sont ensemble, il s ont réussi, la vie normale peut s’installer. Plutôt que de retourner à leur quotidien, ou de dessiner leur avenir, elle préfère conserver une part d’inconnu, et les abandonner sur cette note claire et lumineuse.

La rencontre s’est poursuivie avec la traditionnelle séance de dédicaces, occasion pour les lecteurs d’échanger directement avec Megan Kruse, qui s’est prêtée à l’exercice avec beaucoup de gentillesse.

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Retrouvez De beaux jours à venir, de Megan Kruse, publié chez Denoël.

PS : Un très grand merci à Alexandra alias jalleks pour ses photos !

Où Babelio s’emploie à rendre Facebook un peu plus littéraire

Babelio vous permet maintenant de partager vos dernières lectures avec vos amis Facebook !

Comment ça marche ?

Il vous suffit de connecter votre compte Babelio à votre compte Facebook, en cliquant sur le bouton bleu « Se connecter via Facebook » sur la page de connexion à Babelio.

Sachant que vous pourrez à tout moment déconnecter les comptes dans vos paramètres Facebook (en cliquant sur Paramètres du compte>Applications)

A quoi ça sert ?

En connectant vos deux comptes, vous pourrez  partager sur votre profil Facebook vos dernières actualités Babelio : livres lus, à lire ou en cours, dernières critiques, dernières citations et derniers quiz auxquels vous avez joué.

Et cela vous permet également de voir qui parmi vos amis Facebook est déjà membre de Babelio, pour pouvoir les ajouter à vos amis Babelio.

A quoi ça ressemble ?

Vos actualités Babelio sont réunies dans un bloc au sein de votre page profil. Facebook a fait les choses assez astucieusement : même si vous êtes un très grand lecteur, un critique mitraillette, ou un accro aux quiz littéraires, ces informations ne viendront pas envahir votre profil. Elles seront synthétisées au sein de ce bloc Babelio. Vous pouvez voir ci-dessous un exemple du bloc Babelio et de son intégration au sein d’une page profil.

Alors si vous souhaitez partager vos dernières lectures avec vos amis Facebook, c’est par là :

Où l’on s’efforce de réparer un oubli manifeste

On l’a suffisamment hurlé sur tous les fils twitter, tous les comptes Facebook pour que ça ne vous ait pas échappé : Babelio a eu hier soir les honneurs d’un reportage dans la nouvelle émission culturelle de France 5, Entrée Libre.

La vidéo est ici :

Nous profitons d’ailleurs de ce billet pour remercier France 5, le journaliste Denis Michelis, et Hélène / Austen d’une part, Estelle Divet et Vincent Piccolo du Groupe La Martinière d’autre part, qui ont eu la gentillesse d’accepter de répondre devant la caméra.

Seulement voilà.  Il y a un grand absent dans ce reportage.

Il était comme toujours dans sa tanière, loin des caméras, et il a du coup été scandaleusement oublié : Vassil, le Grand Ours de Babelio.

Babelio est un trépied. Si l’on oublie une jambe, il ne lui faut pas beaucoup de temps pour se casser la gueule…

Nos membres le savent bien, mais les téléspectateurs l’ignorent : Vassil a fondé Babelio, et sans son travail quotidien depuis bientôt 5 ans le site n’existerait pas.

Pour Pierre comme pour moi, il est assez pénible de répéter quotidiennement aux membres, bibliothécaires et éditeurs que Babelio n’a pas un pôle technique de cinq personnes, mais que c’est Vassil qui développe l’intégralité du site.

La rumeur court depuis longtemps dans le milieu des codeurs, ce billet est l’occasion de la confirmer : oui, Vassil a bien 12 doigts, comme le pianiste de Bienvenue à Gattaca.

J’espère que ces quelques mots permettront de rendre à César ce qui est à César, et de réparer le malheureux oubli du reportage. J’en profite d’ailleurs pour annoncer la prochaine grande actualité télévisuelle de Babelio : un documentaire en trois épisodes sur la création du site, plus de cinq heures d’images, avec des archives encore jamais vues à l’écran. En exclusivité, en voici la toute première image :


Pour les plus curieux, elle est tirée de la photo ci-dessous, prise le jour du lancement du site, mais je pense que tout le monde s’en moque.

Plus d’infos bientôt. Pour patienter avant la diffusion, je vous livre ci-dessous la sélection mensuelle de Babelio. Bonnes lectures !

Où Babelio vous propose d’allonger un tout petit peu la liste des fournitures, pour la bonne cause

Chez Babelio, lorsqu’on parle de rentrée, on pense évidemment rentrée littéraire, mais pour beaucoup de lecteurs en herbe, la rentrée qui arrive et qui compte est surtout scolaire.

Les listes de fournitures sont arrivées, et les derniers jours du mois d’août sont pour beaucoup de parents l’occasion de remplir les chariots de copies doubles grands carreaux, de rapporteurs, d’agendas, de papier millimétré, de double-décimètres, de cartouches d’encre standard bleue effaçable, mais aussi de livres.

Pour certains, ces listes représentent un coût important, voire prohibitif.

Nous avons été mis au courant d’une belle initiative lancée par l’association Juste Pour Eux, que nous relayons ici : il s’agit de donner un coup de pouce à des lycéennes du sud du Maroc qui préparent le bac 2012, en leur envoyant des exemplaires des œuvres au programme de terminale.

Trois livres sont au programme :

–          Candide, de Voltaire

–          Le Père Goriot, de Balzac

–          Il était une fois un vieux couple heureux, de Khaïr-Eddine

Le principe est simple : si vous avez un exemplaire d’un de ces trois livres dans votre bibliothèque, ou si vous avez la possibilité de l’ajouter à votre liste de fournitures, vous pouvez l’envoyer à l’adresse suivante :

Studio 157

Mission JPE

157 rue de Verdun

 92150 Suresnes

En pensant à mettre dans le livre une petite dédicace destinée à la lycéenne qui le recevra.

L’association enverra les livres avant le 15 septembre, pour que les élèves les reçoivent pour la rentrée.

N’hésitez pas à envoyer vos livres dédicacés (uniquement les 3 titres cités!), et si vous avez un blog, un compte facebook ou twitter, à faire part de l’opération à d’autres lecteurs !

 

L’opération est détaillée ici ainsi que celles qui l’ont précédée : http://www.lepost.fr/article/2011/08/15/2568944_a-vos-bibliotheques-pour-soutenir-une-action-en-faveur-de-l-education-assjustepoureux.html

Et le site de l’association Juste pour Eux est ici  : http://www.justepoureux.com/

Où Babelio publie des photos de vacances (pas les siennes malheureusement, mais elles valent le coup)

Nos amis d’Actualitté ont parlé ce matin de la Tour de Babel littéraire qui s’érige ces jours-ci à Buenos Aires.

Il se trouve que notre amie Maria (nous avons des tas d’amis…), justement de passage dans la capitale argentine à l’occasion de son tour du monde du jeu a pensé à nous en découvrant la Tour, et nous a envoyé ces très belles photos. Que l’on s’est empressé de partager avec vous !

Merci beaucoup, Maria, et bonne route !